"Gershad", l'application pour échapper à la police des mœurs
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"Gershad", l'application pour échapper à la police des mœurs
Iran : "Gershad", l'application pour échapper à la police des mœurs
VIDÉO. À Téhéran, des informaticiens ont trouvé une parade pour esquiver la brigade qui veille au bon respect des codes vestimentaires.
PAR CLARA BRUNEL
"Miroir, mon beau miroir, dis-moi qui est la plus en règle. » Avant de sortir de chez elles, nombre d'Iraniennes rajustent maquillage et foulard dans l'espoir d'esquiver la police des mœurs, une brigade en charge du strict respect des codes vestimentaires. Le hijab, qui désigne le voile dans son acception large, est obligatoire pour les femmes, dont la tenue ne peut mettre en valeur les attributs. Moins visés par ces critères, les hommes sont malgré tout priés de soigner leur apparence (extravagances capillaires s'abstenir).
Tout contrevenant s'expose au mieux à un avertissement, au pire à une amende. Il peut même écoper d'un séjour au poste. Pour échapper aux griffes de ces escouades le plus souvent postées sur les places des grandes villes, des militants iraniens ont lancé début février « Gershad », une application de géolocalisation qui permet à chaque Iranien de révéler en temps réel façon « Coyote » la position de ces agents sur un plan de Téhéran. Un petit pictogramme en uniforme apparaît sur la carte dès lors qu'un nombre suffisant d'utilisateurs signale leur présence à cet endroit. Disponible depuis quelques semaines sur les téléphones portables équipés du système Android, « Gershad » est l'œuvre d'une équipe de programmeurs anonymes.
3 millions d'avertissements entre mars 2013 et mars 2014
Las « d'être humiliés », ses créateurs entendent ainsi se battre pour leur « droit le plus évident » : celui de « choisir [leurs] propres vêtements ». « Selon le chef adjoint de la police, trois millions de personnes ont reçu des avertissements entre mars 2013 et mars 2014, peut-on lire sur leur site. Nous avons décidé de récupérer une partie de nos libertés de manière pacifique et avec moins de risques. » En Iran, où chaque bouleversement politique du siècle dernier a eu des incidences visibles sur la manière de s'habiller des femmes, les us et coutumes sont toujours aussi contrôlés.
Voilées en 1910 au lendemain de la révolution constitutionnelle perse, les Iraniennes s'étaient séparées dès 1921 de leur foulard, conséquence d'un coup d'État du colonel Reza Khan. S'était ensuivie une modernisation forcée du pays qui avait vu défiler durant cinq décennies toutes sortes de coiffures sophistiquées dans le pays. Le voile ressurgit en 1979 en pleine révolution islamique sous la forme d'un tchador lorsque l'ayatollah Khomeini en impose à nouveau le port. En 2016, si les cheveux dépassent du hijab avec plus de désinvolture, il est encore d'usage pour les femmes de couvrir, en public, leur chevelure.
Le bras droit du pouvoir en place
Contactée par Lepoint.fr, Azadeh Kian*, professeur de sociologie à l'université Paris-Diderot et directrice du Centre d'enseignement, de documentation et de recherches pour les études féministes (Cedref), fait valoir le caractère aléatoire des us et coutumes de la capitale iranienne : « Les règles changent du jour au lendemain. En période d'élections par exemple, on laisse les jeunes s'habiller comme ils le veulent. Mais les conservateurs ont menacé d'être très sévères avec les opposants aux préceptes islamiques. »
Les jeunes hommes téhéranais ne sont pas en reste. Interdiction pour eux de se raser le crâne des deux côtés ni d'arborer tatouages visibles et piercings ostensibles. Exit tout vêtement trop court ou transparent. « Dans les années 1990, le coude était considéré comme une partie sexy de l'anatomie masculine. Si bien que les hommes n'avaient pas le droit de porter des tee-shirts à manches courtes en été, par 40 degrés. » La sociologue rappelle à quoi servent en réalité ces intraitables vigies : « Il ne s'agit pas de policiers ordinaires, mais du bras droit idéologique du pouvoir en place. »
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VIDÉO. À Téhéran, des informaticiens ont trouvé une parade pour esquiver la brigade qui veille au bon respect des codes vestimentaires.
PAR CLARA BRUNEL
"Miroir, mon beau miroir, dis-moi qui est la plus en règle. » Avant de sortir de chez elles, nombre d'Iraniennes rajustent maquillage et foulard dans l'espoir d'esquiver la police des mœurs, une brigade en charge du strict respect des codes vestimentaires. Le hijab, qui désigne le voile dans son acception large, est obligatoire pour les femmes, dont la tenue ne peut mettre en valeur les attributs. Moins visés par ces critères, les hommes sont malgré tout priés de soigner leur apparence (extravagances capillaires s'abstenir).
Tout contrevenant s'expose au mieux à un avertissement, au pire à une amende. Il peut même écoper d'un séjour au poste. Pour échapper aux griffes de ces escouades le plus souvent postées sur les places des grandes villes, des militants iraniens ont lancé début février « Gershad », une application de géolocalisation qui permet à chaque Iranien de révéler en temps réel façon « Coyote » la position de ces agents sur un plan de Téhéran. Un petit pictogramme en uniforme apparaît sur la carte dès lors qu'un nombre suffisant d'utilisateurs signale leur présence à cet endroit. Disponible depuis quelques semaines sur les téléphones portables équipés du système Android, « Gershad » est l'œuvre d'une équipe de programmeurs anonymes.
3 millions d'avertissements entre mars 2013 et mars 2014
Las « d'être humiliés », ses créateurs entendent ainsi se battre pour leur « droit le plus évident » : celui de « choisir [leurs] propres vêtements ». « Selon le chef adjoint de la police, trois millions de personnes ont reçu des avertissements entre mars 2013 et mars 2014, peut-on lire sur leur site. Nous avons décidé de récupérer une partie de nos libertés de manière pacifique et avec moins de risques. » En Iran, où chaque bouleversement politique du siècle dernier a eu des incidences visibles sur la manière de s'habiller des femmes, les us et coutumes sont toujours aussi contrôlés.
Voilées en 1910 au lendemain de la révolution constitutionnelle perse, les Iraniennes s'étaient séparées dès 1921 de leur foulard, conséquence d'un coup d'État du colonel Reza Khan. S'était ensuivie une modernisation forcée du pays qui avait vu défiler durant cinq décennies toutes sortes de coiffures sophistiquées dans le pays. Le voile ressurgit en 1979 en pleine révolution islamique sous la forme d'un tchador lorsque l'ayatollah Khomeini en impose à nouveau le port. En 2016, si les cheveux dépassent du hijab avec plus de désinvolture, il est encore d'usage pour les femmes de couvrir, en public, leur chevelure.
Le bras droit du pouvoir en place
Contactée par Lepoint.fr, Azadeh Kian*, professeur de sociologie à l'université Paris-Diderot et directrice du Centre d'enseignement, de documentation et de recherches pour les études féministes (Cedref), fait valoir le caractère aléatoire des us et coutumes de la capitale iranienne : « Les règles changent du jour au lendemain. En période d'élections par exemple, on laisse les jeunes s'habiller comme ils le veulent. Mais les conservateurs ont menacé d'être très sévères avec les opposants aux préceptes islamiques. »
Les jeunes hommes téhéranais ne sont pas en reste. Interdiction pour eux de se raser le crâne des deux côtés ni d'arborer tatouages visibles et piercings ostensibles. Exit tout vêtement trop court ou transparent. « Dans les années 1990, le coude était considéré comme une partie sexy de l'anatomie masculine. Si bien que les hommes n'avaient pas le droit de porter des tee-shirts à manches courtes en été, par 40 degrés. » La sociologue rappelle à quoi servent en réalité ces intraitables vigies : « Il ne s'agit pas de policiers ordinaires, mais du bras droit idéologique du pouvoir en place. »
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